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Les livres de Clara
28 mai 2011

Une mémoire pour l'oubli (Mahmoud Darwich)

9782742769285

A plusieurs reprises, en lisant cette oeuvre, je me suis surprise à poser le livre, lever la tête, et réfléchir. Nous rendons-nous compte, nous, français, et occidentaux en général, de la chance que nous avons ?

Les français, c'est bien connu, se plaignent de travailler trop, et de ne pas être assez payés. De se lever trop tôt pour aller au travail, de ne pas avoir assez de vacances. Les femmes se plaignent d'être moins payées que les hommes. Les jeunes adolescents se plaignent que leurs parents ne soient pas d'accord pour qu'il soient déjà en couple à l'âge de 17ans. Nous nous plaignons sans cesse de notre président, le décrivant trop stricte.

Les roman autobiographique de Mahmoud Darwich se passe dans un pays ou les femmes ne sont pas considérées comme les égales de hommes, contrairement à chez nous. là-bas, on se marie à un homme que l'on ne connait pas, et qui, peut-être, jamais ne nous aimera vraiment. Ce ne sont pas les parents qui décident de notre vie, mais c'est la religion, une religion pleine d'interdits. Il est interdit de critiquer ne serais-ce qu'un tout petit peu le chef de l'Etat, sous peine d'être puni plus sévèrement que nous, occidentaux, ne pouvons l'immaginer. Nos prisons sont des hotels classés cinq étoiles comparées aux leurs. Dans ce pays, les manifestations sont presque interdites, et dès qu'il y en a, ce ne sont pas les jeunes qui tentent de déstabiliser les CRS, mais c'est l'armée, qui tire, sans vergogne, sur la foule. Pour ce qui est du travail, les hommes (étant donné que les femmes doivent rester à la maison) y vont seulement lorsqu'il le peuvent, c'est-à-dire lorsque les bombardements venant d'Israël ne détruisent pas les toits dans lesquels ils vivent, les rues, les écoles...

Cela se passe au cours de l'été 1982. Beyrouth est assiégée par les troupes israéliennes. Au millieu des bombes, cloitré dans son appartement d'où il lui est impossible de sortir, Mahmoud Darwich se souvient de sa jeunesse, de sa famille, et décrit avec une puissance narrative le cauchemar (le mot est faible) qu'il est en train de vivre. Je ne résiste pas à l'envie de vous en citer un extrait:

"Le missile pourrait bien ne pas me tuer sur le coup, voilà ce que je redoute. Un pan de mur basculera sur moi, lentement, lentement, torture interminable, appel au secours que personne n'entendra. Il m'écrasera une jambe, un bras, le crâne, me brisera la poitrine, et je resterais vivant, des jours durant, sans que personne puisse partir à la recherche des débris humains. Ma chair sera à ce point mêlée au béton, au fer et à la terre, qu'il ne restera plus aucune trace de moi. Le verre de mes lunettes sera fiché dans mes yeux devenus aveugles. Un tige de fer transpercera mes côtes. Je resterai, oublié, au milieu du tas de chair humaine enfermé dans les décombres."

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